CITATIONS


« Je ne dis les autres, sinon pour d'autant plus me dire. » (Montaigne)




L'étonnement d'être né

« Je crois qu'il peut y avoir pour chacun de nous des moments de saisissement, de trouble, devant l'expression pure de la vie, une “révélation” devant ce mystère extraordinaire d'être en vie. » (Françoise Héritier 2012)

« Excepté l'homme, aucun être ne s'étonne de sa propre existence. […] L'homme est un animal métaphysique. [...] Suivant moi, la philosophie naît de notre étonnement au sujet du monde et de notre propre existence, qui s'imposent à notre intellect comme une énigme dont la solution ne cesse dès lors de préoccuper l'humanité. » (Schopenhauer)

« La conscience est un être pour lequel il est dans son être question de son être. » (Sartre 1943)

« Si j'envisage ma venue au monde, – liée à la naissance puis à la conjonction d'un homme et d'une femme, et jusqu'à l'instant de la conjonction – une chance unique décide de la possibilité de ce moi que je suis : en réalité l'improbabilité folle du seul être sans lequel, pour moi, rien ne serait. La plus petite différence dans la suite dont je suis le terme : au lieu de moi avide d'être moi, il n'y aurait qu'un autre, il n'y aurait quant à moi que néant comme si j'étais mort. » (Georges Bataille 1943)

« Pas souhaité vivre. Comment se sont rencontrés mes parents ? Si l'ouvreuse avait placé mon père ailleurs ce jour-là... » (M. Quérin 1962)

« To myself I am the most important person in the world ; though I do not forget that, not even taking into consideration so grand a conception as the Absolute, but from the standpoint of common sense, I am of no consequence whatever. It would have made small difference to the universe if I had never existed. » (Somerset Maugham 1938)

« C'est tout un monde que chacun porte en lui ! un monde ignoré qui naît et qui meurt en silence ! » (Musset)

« Le sentiment de l'existence dépouillé de toute autre affection est par lui-même un sentiment précieux de contentement et de paix... » (Rousseau)


Du cerveau à la conscience

« Notre conscience et notre pensée, si transcendantes qu’elles nous paraissent, ne sont que le produit d’un organe matériel, corporel, le cerveau. La matière n’est pas un produit de l’esprit, mais l’esprit n’est lui-même que le produit le plus élevé de la matière. » (Engels 1888)

« L’encéphale de l’homme se présente à nous comme un gigantesque assemblage de dizaines de milliards de “toiles d’araignées” neuronales enchevêtrées les unes aux autres dans lesquelles “crépitent” et se propagent des myriades d’impulsions électriques prises en relais ici et là par une riche palette de signaux chimiques. » (Jean-Pierre Changeux 1983)

« Que nous dit [...] l’expérience ? Elle nous montre que la vie de l’âme ou, si vous aimez mieux, la vie de la conscience, est liée à la vie du corps, qu’il y a solidarité entre elles, rien de plus. Mais ce point n’a jamais été contesté par personne, et il y a loin de là à soutenir que le cérébral est l’équivalent du mental, qu’on pourrait lire dans un cerveau tout ce qui se passe dans la conscience correspondante. Un vêtement est solidaire du clou auquel il est accroché ; il tombe si l’on arrache le clou ; il oscille si le clou remue ; il se troue, il se déchire si la tête du clou est trop pointue ; il ne s’ensuit pas que chaque détail du clou corresponde à un détail du vêtement, ni que le clou soit l’équivalent du vêtement ; encore moins s’ensuit-il que le clou et le vêtement soient la même chose. Ainsi, la conscience est incontestablement accrochée à un cerveau mais il ne résulte nullement de là que le cerveau dessine tout le détail de la conscience, ni que la conscience soit une fonction du cerveau. Tout ce que l’observation, l’expérience, et par conséquent la science nous permettent d’affirmer, c’est l’existence d’une certaine relation entre le cerveau et la conscience. » (Bergson 1912)

« Dire qu’un raisonnement est conditionné par la vibration des neurones corticaux ce n’est pas du tout l’éclairer en tant qu’opération mentale, ni dans sa valeur logique ni dans sa qualité psychologique d’événement intérieur vécu par le sujet. La pensée n’est pas et ne sera jamais, dans sa signification humaine, un simple frisson du cortex. Aucun progrès de la neurologie n’y changera rien car ce n’est pas la question. » (Léon Meynard 1958a)

« En un sens c’est [le cerveau] qui est l’épiphénomène, le phénomène secondaire destiné à permettre par ses structures physiques et biologiques la manifestation de l’esprit dont [il] n’est alors que l’instrument. C’est l’esprit qui est la réalité première et fondamentale... » (d'après Léon Meynard 1958b)

« On ne ramènera jamais les manifestations de notre âme aux propriétés brutes des appareils nerveux pas plus qu’on ne comprendra de suaves mélodies par les seules propriétés du bois ou des cordes du violon qui sont nécessaires pour les exprimer. » (Claude Bernard)

« Comment se peut-il que quelque chose d’aussi remarquable qu’un état de conscience se produise sous l’effet de l’irritation d’un tissu nerveux ? Cela est tout aussi inexplicable que l’apparition du Djinn quand Aladin frottait sa lampe. » (Thomas Huxley 1868)

« L’explication même fine des phénomènes physico-chimiques qui “accompagnent” la vision ne peut pas rendre compte du fait même de voir. Si, en physiologue, je suis pas à pas le cheminement de l’ “excitation” provoquée sur la rétine jusqu’au “centre” visuel à travers la complexité des relais [...], mon schéma aura beau être aussi adéquat que l’on voudra aux faits, il ne pourra jamais rendre compte de ce fait fondamental, à savoir que je vois. » (Jean-François Lyotard 1954)

« Une sensation qui ne serait pas éprouvée resterait lettre morte, telle la couleur pour un aveugle-né ; néanmoins tout ce que la science sait sur cette sensation, qu’elle croit avoir expliquée, ne dépasse pas ce qu’en peut savoir cet aveugle. » (René Huyghe 1971)

« Qu’est-ce qui fait que nous souffrons effectivement de maux de dents, ou que nous voyons bleu le bleu du ciel ? La théorie computationnelle de l’esprit, même étayée sur des systèmes neuronaux complets, n’apporte aucune réponse claire. » (Steven Pinker 2000)

« Il existe une très étroite corrélation entre les états mentaux vécus et les faits cérébraux observés, en même temps qu’une différence abyssale entre eux. [...] Si, rendu minuscule par quelque opération, je pouvais entrer dans le cerveau de quelqu’un comme on entre dans un moulin [...], je n’y rencontrerais jamais de la pensée, de la conscience, de la subjectivité, mais seulement des neurones, des synapses, des neuro-transmetteurs. » (Hubert Saget 2008)

« Si, comme l’a suggéré Bergson, nos moyens d’appréhension du cerveau nous permettaient de saisir dans le cerveau vivant le jeu des électrons, des photons, en bref, de tous les éléments les plus subtils de l’énergie, nous saurions bien que tel cerveau est actif c’est-à-dire pense, mais nous ne connaîtrions rien de l’essence de sa pensée. » (Jean Lhermitte 1951)

« Comme le soulignait le philosophe Thomas Nagel [...], nous pouvons toujours décrire minutieusement le cerveau d’une chauve-souris, projeter sur l’animal nos propres expériences, nous ne saurons jamais ce que ressent le chiroptère lorsqu’il perçoit le monde grâce aux ultrasons. [...] Ce qui demeurera à jamais mystérieux, ce sont ces impressions subjectives que les philosophes appellent les “qualia” : ce jaune somptueux qui nous comble quand nous contemplons un citron mûr, ou la nuance à couper le souffle d’un rose ardent aperçue lors d’un coucher de soleil. [...] Ils sont, une fois que l’on a tenté de réduire la conscience à un ensemble de faits purement physiques, ce plus petit indéfinissable qui nous échappe. Car comment une série de cellules disparates peut générer ces émotions et faire naître le sentiment de soi ? Comment de la matière grise pourrait-elle fabriquer de la conscience ? » (Rafaële Brillaud 2011)

De l'élémentaire...

« Bien avant l’étape du cortex, récente, qui confère une conscience très complexe, et bien avant l’étape du tronc cérébral, plus ancienne et plus grossière, il existe une autre étape, qui a tous les principes de la conscience, mais qui précède même le système nerveux. On la trouve chez des organismes unicellulaires comme les paramécies, et elle vise déjà à réguler la vie. Le début de la conscience est le ressenti d’un état de l’organisme. » (Antonio Damasio 2011)

... à l'infini

« Comment cette masse gélatineuse d'un kilo trois cents grammes et qui tient dans la main peut-elle imaginer des anges, explorer l'infini, s'interroger sur sa propre place dans le cosmos ? » (Vilayanur Ramachandran 2011)


L'homme dans l'Univers

« La Terre est une planète de taille moyenne tournant autour d’une étoile normale dans les régions extérieures d’une galaxie-spirale ordinaire, qui n’est elle-même qu’une galaxie parmi les milliers de milliards d’autres dans l’univers observable. Maintenant, le principe anthropique fort poserait que l’ensemble de cette grande construction n’existerait que pour nous. C’est très difficile à croire. » (Stephen Hawking 1989)

« Il est quasiment impossible aux êtres humains de ne pas croire qu’il existe une relation particulière entre eux et l’univers, que la vie n’est pas seulement l’aboutissement grotesque d’une suite d’accidents remontant dans le passé jusqu’aux trois premières minutes, mais que, d’une certaine façon, nous fûmes conçus dès le commencement. [...]
   On a peine à croire que tout ceci n’est qu’une partie minuscule d’un univers écrasant et hostile. Il est plus difficile encore de réaliser que cet univers a évolué à partir de conditions initiales si peu familières qu’on peut à peine les imaginer, et doit finir par s’éteindre dans un froid interminable ou dans une chaleur d’enfer. Plus l’univers nous semble compréhensible, et plus il semble absurde. » (Steven Weinberg 1978)

« L'ancienne alliance est rompue ; l'homme sait enfin qu'il est seul dans l'immensité indifférente de l'Univers d'où il a émergé par hasard. » (Jacques Monod 1970)

« Pour [Jacques Monod], la vie ne faisait pas partie des grandes lois de la nature ; elle était tolérée comme une fluctuation, un peu comme l’insertion du hasard incompréhensible dans le cadre immuable des grandes lois déterministes de la nature. [...] Je crois que la situation aujourd’hui se retourne. Le cerveau, la pensée deviennent l’expression suprême des lois de la nature... » (Ilya Prigogine 1990)

« Toutes les propriétés de l’Univers observables autour de nous [...] dépendent de constantes physiques correspondant à une quinzaine de nombres. [...] On s’est aperçu que si l’on variait un tant soit peu ces conditions physiques, l’Univers ne pourrait pas fabriquer d’étoiles. Sans étoiles, pas d’éléments lourds [...] pour construire la chimie nécessaire aux chaînes d’ADN qui portent nos gènes, ou former les neurones qui sont le support de notre conscience. L’Univers a été réglé de façon extrêmement précise pour que nous soyons ici. Tout se joue sur un équilibre très délicat. La densité initiale de l’Univers doit être réglée avec un précision de 1060, comparable à celle dont devrait être capable un archer pour planter une flèche dans une cible carrée d’un centimètre de coté qui serait placée aux confins de l’Univers, à une distance de 15 milliards d’années-lumière ! Un changement infime entraînerait la stérilité de l’Univers. Nous voici donc intimement liés au cosmos. Et nous sommes là pour lui donner du sens. » (Trinh Xuan Thuan 2011)

« A mon sens, depuis les années 1970 et l’élaboration du principe anthropique moderne, il est évident que l’ajustement des constantes de la nature ne peut être dû au hasard. [...] Je sais que, pour certains, le hasard et la théorie des multivers suffisent à expliquer notre existence dans l’Univers, voire sa beauté. Mais ces hypothèses ne sont pas vérifiables scientifiquement ; elles sont en dehors de la science. » (Jean Kovalesky 2013)

« On ne voit pas comment la pensée aurait pu apparaître et grandir dans le monde si, déjà, le monde ne l’avait portée en lui comme une secrète tendance susceptible de lui donner enfin son couronnement et sa parfaite raison d’être. La genèse de l’esprit à partir de la matière est absolument impensable : jamais l’esprit ne fût sorti de son contraire si la matière n’en eût porté en elle l’impérieuse exigence. [...]
   Il fallait que la matière fût ce qu’elle est pour que la vie fût et que la vie à son tour eût les propriétés qui lui sont propres pour qu’en elle l’esprit fît éclosion au-dessus du psychisme inférieur qui l’annonce ou le prépare. [...] Nous disons l’esprit, plus encore que l’homme, pour éviter le reproche d’anthropomorphisme et aussi parce que l’esprit n’est pas le tout de l’homme et enfin parce que l’homme n’est peut-être pas la fin suprême et exclusive de la grandiose dialectique d’un univers finalisé. » (Léon Meynard 1958b)

« L’homme n’est peut-être pas la seule créature au monde à détenir le privilège de la pensée. De grands métaphysiciens, Descartes, Leibniz, nous avaient mis en garde, dès le XVIIe siècle, contre un anthropocentrisme excessif. Mais, en définitive, qu’il y ait ou non pluralité de mondes habités, [...] l’esprit n’en reste pas moins roi du monde, lumière brillant sur la seule terre des hommes ou rayonnant aussi au fond des galaxies. » (Léon Meynard 1958c)

« Teilhard [de Chardin] a toujours pensé que le nombre des “planètes pensantes”, compte tenu des milliards d’étoiles circulant dans des milliards de galaxies, devait être énorme, et que la pensée, produit de la Cosmogenèse, devait fleurir dès que les circonstances lui devenaient favorables. » (Jean Onimus 1996)

« ... il est dans la nature même de la vie d’engendrer l’intelligence partout où (et dès que) les conditions requises sont réunies. La pensée consciente appartient au tableau cosmologique, non pas comme un quelconque épiphénomène propre à notre biosphère, mais comme une manifestation fondamentale de la matière. La pensée est engendrée et nourrie par le reste du cosmos. » (Christian de Duve 1996)

« Si le psychisme et l'intelligence ont finalement émergé de l'Évolution, c'est certainement bien qu'en quelque manière ils lui étaient déjà présents à l'origine. » (Olivier Costa de Beauregard 1963)

« Il fallait que la vie et la pensée soient déjà inscrites dans les potentialités de l’Univers primitif. » (Hubert Reeves 1998)

« L'Univers donne naissance à des êtres conscients. Les êtres conscients donnent un sens à l'Univers. » (D'après J.A. Wheeler 1975)

« M. Mounier-Kuhn : Quelle est la place de l’homme dans cet univers ?
H. Reeves : Ici, je n'ai pas beaucoup d'idées claires. J'ai surtout des questions que je n'arrive pas à formuler convenablement, II m'est plus facile de définir ma position par rapport à d'autres “visions”. Par exemple celle de Jacques Monod, lorsqu'il écrit que “1a matière n’est pas grosse de la vie et la vie n'est pas grosse de l'homme”. Ou encore celle de Lévi-Strauss : “L'univers est né sans l'homme et il mourra sans l’homme.” II me semble au contraire que l'être humain est une partie essentielle de l'économie de l'univers. [...]
   Sur notre planète, le “fruit” le plus avancé de [la] gestation cosmique c’est l’être humain capable de prendre conscience de sa propre existence, capable de connaître l’univers qui l’a engendré... Il n’est pas absurde de dire que l’univers a évolué ‘comme si’ il voulait engendrer un être capable de prendre conscience de sa propre existence (tout en reconnaissant le caractère parfaitement anthropomorphique de cette proposition). On peut aujourd’hui sans se dégrader intellectuellement faire sienne l’idée que l’univers est en définitive une machine à fabriquer de la conscience. Et que cela prend quinze milliards d’années. Mais pourquoi ? Dans quelle finalité ? Cela je n’en ai pas la moindre idée. [...]
E. Morin : [...] Ceci m’amène à penser, dans le prolongement de ce que dit Reeves, à un passage extraordinaire, pour moi, du mathématicien Spencer Brown. Il dit à peu près ceci : ‘à supposer que l’univers ait eu envie de prendre conscience de lui-même, il faudrait qu’il se distancie de lui-même pour pouvoir se considérer’. Il faudrait donc qu’il lance en dehors de lui une sorte de pédoncule ou de pseudopode, qu’il soit assez étranger à l’univers pour qu’il puisse se regarder. Autrement dit, l’univers n’est pas capable de se réfléchir soi-même, s’il ne se distancie pas par rapport à lui-même. C’est comme notre conscience : elle a besoin de se dédoubler. Donc si nous sommes là et si nous prenons conscience de l’univers, nous devenons d’une certaine façon ‘étrangers’ à cet univers. L’univers en tant que tel a besoin d’exiler une partie de lui-même s’il veut prendre conscience, pour rester dans cette hypothèse. » (Edgar Morin 1999)

« « Il y a plus de distance entre l’univers et l’homme en train de le penser qu’entre un grain de sable et l’océan. Mais le grain de sable, qui est moins que rien, est capable – miracle inouï – de se penser lui-même et de penser le tout. » (Jean d’Ormesson 2010)


La vie, l'Évolution...

« Le vivant n’est pas aussi beau, aussi propre que le monde des astres ou de l’électronique ; le vivant est rempli de sang, de terre, d’humeurs ; le vivant est marqué par la mort. Les biologistes en ont une réelle conscience et une réelle expérience. » (Jacques Arnould 2009)

« On soulève la question de savoir qui empêche que la nature, au lieu d’agir en vue d’une fin et du meilleur, agisse comme le ciel quand il verse la pluie, c’est-à-dire par nécessité : car en s’élevant les exhalaisons se refroidissent forcément et ainsi refroidies deviennent de l’eau qui tombe ; puis il arrive, en conséquence, cet accident que le blé pousse. Si au contraire la conséquence est que du blé se perd sur une aire, c’est encore la même chose : ce n’est pas dans ce but que le ciel a versé la pluie et la perte du blé est un accident. Cela compris, qui empêche que, de son côté, la nature ne procède de même pour les parties des vivants ? Les dents, par exemple, naîtraient, les unes, les incisives, tranchantes et aptes à couper les aliments, les autres, les molaires, larges et susceptibles de les broyer, sans qu’il y eût là, au lieu de buts, autre chose que des accidents. La même conception s’appliquerait à toutes les autres parties dans lesquelles l’opinion commune croit voir des buts. Les êtres dans lesquels il s’est trouvé que toutes les parties sont telles que si elles avaient été faites pour un but, ceux-là ont survécu parce que leur constitution possédait par hasard les aptitudes requises : ceux pour qui il n’en a pas été ainsi ont péri et périssent. » (Aristote)

Jean Rostand 1954

« Comme l'avait déjà noté le vieux Théophraste, il y a beaucoup de choses mal faites dans le règne vivant. [...] Si, cessant de prôner béatement la nature, on s’enhardit à la chicaner, on s’avise qu’elle foisonne d’erreurs, de superfluités, de complications gratuites ou malfaisantes. [...] Sans doute il y a aussi beaucoup de réussites dans la nature ; mais, philosophiquement, elles ont moins de sens que ses échecs. La nécessité aveugle pourrait imiter le dessein, mais le dessein ne saurait imiter la nécessité aveugle. »

« Ce que nous apercevons de la lutte pour la vie ne nous donne qu’une faible idée du massacre universel. »

« Certains esprits [...] voient dans l'espèce humaine un chef-d'œuvre prémédité et de longue haleine. En dépit de son insignifiance pondérable, l'homme représente à leurs yeux bien autre chose qu'un simple accident ou épisode du devenir ; le “roseau pensant” n'est pas seulement plus noble que “ce qui le tue”, il en est la raison d'être et le but. Comme le poète Mallarmé disait que l'univers est fait pour aboutir à un beau livre, de même ils tiennent que l'univers a existé dans sa totalité pour qu'à telle heure et en tel lieu apparût le fragile être humain... Mais il est d'autres esprits qui voient les choses tout différemment. Ceux-là, malgré tout leur bon vouloir, ne parviennent à discerner dans la nature aucun souci de l'homme ; ils pensent que la vie a poussé comme elle a pu, sans soins, sans protection, sans mystérieuse connivence avec le reste des choses ; ils pensent que, ni préparé ni attendu, l'homme pour se maintenir a dû lutter durement contre un milieu hostile ; ils pensent que rien n'avait prévu, que rien n'avait voulu le lourd et anfractueux cerveau de l'Homo sapiens et que, si les petits mammifères du tertiaire n'avaient pas eu de goût pour les œufs des grands Sauriens, le règne animal n'aurait pas connu le même roi ; ils pensent que la pensée humaine, cette façon d'intruse, n'a pas plus d'importance dans l'inerte cosmos que le chant des rainettes ou le bruit du vent dans les arbres...  »

« D'où vient l'homme?  D'une lignée hétéroclite de bêtes aujourd'hui disparues, et qui comptaient des gelées marines, des vers rampants, des poissons visqueux, des mammifères velus... Par cette chaîne d'ancêtres, dont l'humilité augmente à mesure qu'on s'enfonce dans la durée, il se rattache sans solution de continuité aux microscopiques éléments qui naquirent, voici plus d'un milliard d'années, aux dépens de la croûte terrestre.
   Accident entre les accidents, il est le résultat d'une suite de hasards, dont le premier et le plus improbable fut la formation spontanée de ces étranges composés du carbone qui s'associèrent en protoplasme.
   L'homme n'est rien moins que l'œuvre d'une volonté lucide, il n'est même pas l'aboutissement d'un effort sourd et confus.  Les processus aveugles et désordonnés qui l'ont conçu ne recherchaient rien, n'aspiraient à rien, ne tendaient vers rien, même le plus vaguement du monde. Il naquit sans raison et sans but, comme naquirent tous les êtres, n'importe comment, n'importe quand, n'importe où. La nature est sans préférences, et l'homme, malgré tout son génie, ne vaut pas plus pour elle que n'importe laquelle des millions d'autres espèces que produisit la vie terrestre. Si la tige des primates avait été sectionnée à sa base par quelque accident géologique, la conscience réfléchie ne serait jamais apparue sur la terre. Il est possible d'ailleurs que, dans le cours des siècles, certaines lignées organiques aient été éliminées qui eussent donné naissance à des formes plus accomplies que la nôtre.
   Quoi qu'il en soit, l'homme est apparu... D'une certaine lignée animale, qui ne semblait en rien promise à un tel destin, sortit un jour la bête saugrenue qui devait inventer le calcul intégral et rêver de justice. »

« L'espèce humaine passera, comme ont passé les Dinosaures et les Stégocéphales. Peu à peu, la petite étoile qui nous sert de soleil abandonnera sa force éclairante et chauffante. Toute  vie alors aura cessé sur la Terre [...]. Alors, de toute la civilisation humaine ou surhumaine — découvertes, philosophies, idéaux, religions —, rien ne subsistera. [...] En ce minuscule coin d'univers sera annulée pour jamais l'aventure falote du protoplasme. Aventure qui déjà, peut-être, s'est achevée sur d'autres mondes... Aventure qui, en d'autres mondes peut-être, se renouvellera... »

Stephen J. Gould

« Nous savons que la Terre a existé des millions d’années durant avant que l’homme n’apparaisse, à la dernière millimicroseconde de cette histoire. Si l’humanité n’est apparue que d’hier, petit rameau sur une des branches d’un arbre florissant, alors la vie ne peut en aucune façon exister pour nous ou à cause de nous. » (1990)

« L'évolution de la vie à la surface de la planète est conforme au modèle du buisson touffu doté d'innombrables branches et continuellement élagué par le sinistre sécateur de l'extinction. [...] Elle ne ressemble pas à cette montée régulière de l'existence, de la complexité et de la diversité, comme on le raconte traditionnellement. » (1989)

« L’exubérance biologique spectaculaire du Cambrien, cachée au cœur du Schiste de Burgess et de nombreux autres gisements fossiles de la même époque, eut un sort peu enviable : la plupart des lignées issues de ces animaux se sont éteintes. [...] Dans ce contexte, S. J. Gould en vient à repenser la représentation traditionnelle de l’évolution : ‘La réinterprétation du Schiste de Burgess renverse littéralement l’image traditionnelle de l’évolution représentée comme un progrès sur une échelle ou un cône qui va du plus simple et du plus ancien vers le plus complexe et le plus récent. [...] Le Schiste de Burgess nous montre que c’est l’élimination qui joue après le Cambrien et non pas l’expansion.’ Pour lui, les notions d’accumulation et de progrès ne sont pas pertinentes. Le principal enseignement qu’il tire du Schiste de Burgess est le rôle fondamental que joue la contingence dans l’évolution. Contingence qui fait de l’évolution un processus historique par nature imprévisible. S. J. Gould se refuse énergiquement à y déceler le moindre sens, la moindre prédétermination. Il en veut pour meilleur exemple le rôle du hasard dans la décimation des espèces lors des extinctions de masse. [...] A ce moment-là, un trait adaptatif secondaire peut permettre à une espèce de survivre. Ce fut probablement le cas lorsque les mammifères, jusqu’alors réduits à la portion congrue, ont pris la place des dinosaures après leur extinction. Ce n’est pas parce qu’ils étaient mieux adaptés. Autrement dit, nous avons eu beaucoup de chance. » (Philippe Chambon 1991)

« [Si nous] rembobinions le film de la vie jusqu’à l’apparition des animaux multicellulaires modernes lors de l’explosion du Cambrien, puis si nous repassions le film à partir de ce même point de départ, l’évolution repeuplerait la Terre de créatures radicalement différentes. La probabilité pour que ce scénario fasse apparaître une créature ressemblant même de loin à un être humain est effectivement nulle et celle de voir émerger un être doté d’une conscience, extrêmement faible. » (1997)

Teilhard de Chardin

« ... la Vie, non point anomalie bizarre, sporadiquement florissant sur la matière — mais la Vie exagération privilégiée d’une propriété cosmique universelle —, la Vie, non pas un épiphénomène, mais l’essence même du Phénomène. » (1956)

« Nous comprenons mieux que la vie ne puisse plus être regardée dans l’Univers comme un accident superficiel, mais que nous devions l’y considérer comme en pression partout – prête à sourdre partout dans le cosmos par la moindre fissure –, et, une fois apparue, incapable de ne pas utiliser toute chance et tout moyen pour arriver à l’extrême de tout ce qu’elle peut atteindre, extérieurement de complexité, et intérieurement de conscience. » (1956)

« L’Homme : non pas un type zoologique comme les autres. Mais l’Homme, noyau d’un mouvement de reploiement et de convergence où se trahit localement sur notre petite planète (si perdue soit-elle dans le temps et l’espace), ce qui est probablement la dérive la plus caractéristique et la plus révélatrice des immensités qui nous enveloppent. » (1956)

« L’ “impetus” du Monde, trahi par la grande poussée de conscience, ne peut avoir sa source dernière, il ne trouve d’explication à sa marche, irréversiblement tendue vers de plus hauts psychismes, que dans l’existence de quelque principe intérieur au mouvement. » (1955)

« L’apparente restriction du phénomène de conscience aux formes supérieures de la vie a servi longtemps de prétexte à la science pour l’éliminer de ses constructions de l’Univers. Exception bizarre, fonction aberrante, épiphénomène : sous quelqu’un de ces mots on rangeait la pensée pour s’en débarrasser. Mais que fût-il advenu de la physique moderne si on avait classé, sans plus, le radium parmi les corps ‘anormaux’ ? [...] Qui ne voit, ici et là, un problème identique se poser aux chercheurs, et qui doit être résolu par la même méthode : découvrir l’universel sous l’exceptionnel. [...]
  “La conscience n’apparaît avec complète évidence que dans l’Homme”, étions-nous tentés de dire, “donc elle est un cas isolé, inintéressant pour la Science”.  “La conscience apparaît avec évidence dans l’Homme”, faut-il reprendre en nous corrigeant, “donc, entrevue dans ce seul éclair, elle a une extension cosmique”... » (1955)

Divers

«  Chaque fois qu’on peut pratiquer [une] analyse des lignées, on constate que les caractères se modifient dans un sens donné, qu’il y a canalisation des formes. Tout se passe comme dans le cas d’une rivière établissant peu à peu son cours selon la pente du terrain. Et de même que, dans l’exemple de la rivière, une même action de gravité agit toujours et partout sur l’eau qui s’écoule, ainsi convient-il d’admettre l’existence d’un facteur de fond agissant sur le déroulement de l’orthogenèse. Quel peut être ce facteur ?
  Quand on considère la multiplicité des phylums en lesquels se résout la biosphère, on pourrait croire que la vie a tout essayé. En fait, elle a, essentiellement, essayé dans le même sens, dans le sens d’un arrangement de plus en plus complexe et d’un psychisme plus élevé. La tendance vers plus de conscience, tel est le moteur de l’orthogenèse. » (Jean Piveteau 1987)

« [Certains scientifiques affirment] que l’évolution, si on la répète, donnera un résultat plus ou moins identique à celui que l’on observe sur terre et surtout que des êtres pourvus d’une conscience évoluée, tels que nous, apparaîtront presque toujours, même s’ils ne sont pas entièrement semblables à nous. Comment peuvent-ils affirmer cela ? A cause de l’existence de contraintes s’exerçant sur le hasard qui obligent l’évolution à arriver au même but par des voies pouvant être totalement différentes. [...]
   [D’autres] partagent l’idée que le hasard et la sélection naturelle ne dirigent pas seuls l’évolution. […] L’ordre peut émerger du chaos grâce à un certain nombre de lois sous-jacentes. Sans aucune finalité, sans que l’évolution soit prévisible, l’ordre est spontanément engendré par les lois de la nature. [...] [On trouve en même temps] des scientifiques pensant qu’il existe une logique interne de la vie sans que cela implique un but de l’évolution, et d’autres pour lesquels un tel but existe parce que l’évolution est programmée. » (Jean Staune 2007)

« Il est très probable que la vie est largement répandue dans l’univers. [...] Pour certains théoriciens, [...] les conditions dans lesquelles la vie peut prendre naissance dépendent d’une série d’accidents très improbables : la vie extra-terrestre devrait donc revêtir les formes les plus inattendues, fondées par exemple sur une autre chimie que celle du carbone. Ce serait faire preuve d’un anthropocentrisme naïf que de croire que ces êtres, s’ils existent, puissent nous ressembler.
   D’autres théoriciens défendent un point de vue presque totalement opposé. [...] Dans cette optique, la vie n’est pas le fait du hasard ; elle résulte d’un enchaînement d’événements probables, nécessaires, déterminant rigoureusement la succession des phénomènes ultérieurs. [...] Poussant le raisonnement logique le plus loin possible, ceux qui partagent cette opinion estiment qu’il y a une assez forte probabilité pour que les formes de vie extra-terrestre soient relativement proches de celles que nous connaissons sur la Terre. » (Joël de Rosnay 1966)


La sexualité

« Sexuality is the main drive in a human being, it takes an important role in everybody's life, and in the end, everybody has problems in dealing with that. » (Ulrich Seidl 2012)

« Aux luxurieux il [le diable] dit que la chair revendique ce qui lui revient [de droit] ; son appétit naturel lui étant venu de Dieu, il est impensable que [l’assouvissement de ses désirs] soit un péché mortel. » (Thomas van der Noot 1517)

« Ce n’est pas en vue de la procréation qu’ils pratiquent l’acte honteux, mais par pure volupté, le Diable se jouant d’eux et déshonorant la créature de Dieu. » (Saint Épiphane de Salamine, IVe siècle)

« Il y a des eunuques qui se sont eux-mêmes rendus tels à cause du Royaume des cieux. » (Évangile selon Matthieu)

« Il arriva qu’un soir, ma sœur Mary se trouva tout à coup près de mon lit. Je ne l’avais pas entendue venir, mais du reste, pourquoi me serais-je caché, ne me sentant pas coupable ? D’un geste énergique, elle rabattit la couverture jusqu’à mes pieds et avec un grand cri appela ma mère qui accourut, le bougeoir au poing. Dans la lumière, j’apparus tel que j’étais, ne comprenant rien, souriant peut-être, les mains dans la région défendue...  I’ll cut it off !” s’écria ma mère en brandissant le couteau à pain... » (Julien Green 1963)

« Nous venons d’un monde où le haut chemin s’est voulu continence par la répression de la chair, par la persécution volontaire de la puissante envie charnelle. Je n’ai pas de goût pour ce chemin-là. C’est le fait de ma faiblesse, sans doute ; mais c’est aussi qu’il me paraît suspect. Je me demande quel sombre désir est à l’œuvre dans cette frénésie du non-désir. » (Maurice Bellet 1988)

« Le plaisir érotique peut être considéré comme un facteur organisateur majeur du psychisme et des comportements. Des données éthologiques et, surtout, ethnologiques montrent l’importance majeure des processus érotiques et de renforcement dans la sexualité humaine.
   On observe déjà une prépondérance du plaisir somato-sensoriel sur les autres stimuli-signaux de la reproduction chez les chimpanzés pan paniscus. Les bonobos pratiquent quotidiennement de nombreuses activités érotiques, orales et génitales, auto- et homoérotiques, qui semblent avoir pour motivation principale le plaisir, et qui pour la plupart n’ont aucun rapport avec la reproduction. […].
   Dans plusieurs sociétés (Marquisiens, Trobriandais, Copper Inuit, Pilaga…), situées dans différentes régions du monde, il existe peu ou pas de restrictions à la sexualité des enfants. […] Ce phénomène d’érotisation débute par des stimulations corporelles […] et semble totalement indépendant du phénomène de la reproduction.
   Ces données permettent de comprendre et d’expliquer la grande diversité des activités érotiques humaines à partir d’un seul modèle. Les grands types d’activités érotiques connus (masturbation, activités homoérotiques ou hétéroérotiques, en couple ou en groupe, activités érotiques avec des objets), ayant actuellement chacun une explication causale différente (reproduction, instinct, plaisir, pathologie, perversion…), peuvent être regroupés dans un seul modèle neurobiologique explicatif, global et cohérent. […] En effet, si le plaisir physique intense, principalement provoqué par des stimulations mécaniques, est bien le facteur neurologique majeur à l’origine des activités érotiques, il est biologiquement ‘logique’ et ‘normal’ que l’être humain cherche à reproduire toutes les situations de jouissance érotique et orgastique qu’il découvre, quel qu’en soit le moyen. […] La plupart de ces pratiques n’ont aucun rapport avec la reproduction. » (S. Wunsch et Ph. Brenot 2005)

« Je pense qu’il faut tout dire, ne serait-ce que pour s’habituer à des choses qu’on fait tous, et qu’on ne peut pas criminaliser. [Il ne faut pas] créer un domaine de terreur de ce qui est notre corps, notre vie, et se dire que c’est quelque chose qui est de l’ordre de la concupiscence, tous ces mots terribles [...]. Si on a honte de ce qu’on est, on perd son identité, on perd sa conscience. » (Catherine Breillat ~ 2000)

« Qu’a faict l’action genitale aux hommes, si naturelle, ni necessaire et si juste, pour n’en oser parler sans vergongne et pour l’exclurre des propos serieux et reglez ? Nous prononçons hardiment : tuer, desrober, trahir ; et cela, nous n’oserions qu’entre les dents ? Est-ce à dire que moins nous exhalons en parole, d’autant nous avons loy d’en grossir la pensée ? » (Montaigne)

« Pourquoi sommes-nous devenus tellement plus tolérants dans certains domaines (l’homosexualité, la masturbation, l’échangisme…), et tellement plus sévères dans d’autres (le viol, le proxénétisme, la pédophilie) ? La réponse, à mon avis, est la suivante : c’est que l’homosexualité, la masturbation et l’échangisme, entre partenaires adultes et consentants, cela ne fait de mal à personne – cela fait même du bien, semble-t-il, à plusieurs. Pourquoi dès lors le leur reprocher ? Alors que le viol, le proxénétisme, la pédophilie, cela fait du mal à quelqu’un : cela porte atteinte à son intégrité, à sa dignité, à sa liberté […]. Nous sommes passés d’une morale transcendante ou religieuse pour laquelle le bien c’était ce qui était ordonné (les commandements), le mal ce qui était interdit, à une morale immanente ou humaniste, pour laquelle le mal c’est ce qui fait du mal à quelqu’un, le bien, ce qui fait du bien à quelqu’un. » (André Comte-Sponville 2003)

« The view of sex as essentially a means to procreation condemns masturbation as a deviation from the natural purpose of the sexual organs and all sexual activity, as unnatural and immoral “self-abuse” for the sake of sheer bodily pleasure. The weight of the condemnation implied in the characterization of an activity as unnatural is such that Thomas Aquinas can say that masturbation is worse than adultery, incest, or rape. [...]
  The view of sex as bound up with love condemns masturbation as a deviation from the proper focus of sexual desire on the beloved person. This is a very unattractive thing to have to say, however, for two reasons. Masturbation is much too elementary, general and frequent a type of sexual behavior to be classified as mere deviation. And the view that masturbation is most of the time merely a substitute for “the real thing” is misguided too. [...]
  The source of this problem with masturbation is the assumption about interpersonal nature of sex [...]. It seems that we must discard this assumption and adopt an even narrower, plainer view of sex. Sexual activity can then be defined as activity that tends to fulfill sexual desire, while sexual desire is sufficiently defined as the desire for certain bodily pleasures, period. This includes both sex with another person and solitary sex; the latter is not relegated beyond the pale, as some sort of imaginative substitute for, or deviation from, the former. » (Igor Primoratz 2003)

« Le sexe et l’amour sont deux choses différentes, qu’on peut bien sûr vivre ensemble, heureusement, mais qui n’en sont pas moins disjointes. On peut avoir des rapports sexuels avec quelqu’un dont on n’est pas amoureux. Ou aimer quelqu’un sans qu’il y ait de rapports sexuels. Mais c’est précisément parce que l’amour et la sexualité sont deux choses différentes que la rencontre entre les deux est sans doute ce qu’on peut vivre de meilleur ! » (André Comte-Sponville 2012)

« Il faut bien que le corps exulte. » (Jacques Brel 1967)


La mort

« Le soleil ni la mort ne se peuvent regarder fixement. » (La Rochefoucauld)

« De deux choses l’une : ou bien celui qui est mort est réduit au néant et n’a plus aucune conscience de rien, ou bien, conformément à ce qui se dit, la mort est un changement, une transmigration de l’âme du lieu où nous sommes dans un autre lieu. Si la mort est l’extinction de tout sentiment et ressemble à un de ces sommeils où l’on ne voit rien, même en songe, c’est un merveilleux gain que de mourir […] puisque alors toute la suite des temps ne paraît plus ainsi qu’une seule nuit.
   D’un autre côté, si la mort est comme un passage d’ici-bas dans un autre lieu, et s’il est vrai, comme on le dit, que tous les morts y sont réunis, peut-on […] imaginer un plus grand bien ? » (Socrate)

« ... Pour moi, voilà longtemps que j'ai fait l'épreuve de la mort.  – Quand cela, demandes-tu ?  – Avant même de naître. La mort consiste à n'être pas ; ce que c'est que de n'être pas, je le sais déjà : il en ira après moi comme il en était avant moi. S'il y a dans cet état quelque tourment, de toute nécessité il en devait être ainsi avant notre venue au monde. Or nous n'avons éprouvé alors aucune souffrance. Voyons : ne tiendrais-tu pas pour un triple sot celui qui estimerait l'état d'une lampe pire lorsqu'elle est éteinte qu'avant d'être allumée ? Eh bien nous aussi, on nous allume, on nous éteint : dans l'intervalle, nous sommes sujets à souffrir, mais au-delà dans les deux sens règne une quiétude absolue. Notre erreur, si je ne me trompe, mon cher Lucilius, c'est de croire que la mort vient après, alors qu'elle précédait et qu'elle suivra. Tout ce qui était avant nous, c'est la mort : qu'importe en effet de ne pas commencer ou de finir ? Dans les deux cas le résultat est le même : le non-être. » (Sénèque, Lettre LIV)

« [Sénèque] parle en vingt endroits du sort de l'âme après la mort, mais sans conclure : il ne sait pas et il l'avoue ; il ne cache pas non plus qu'il désire y croire : “Je viens de passer des heures enchantées, je me prêtais complaisamment à l'opinion que l'âme est immortelle, je me livrais à ce rêve si joli.” » (Paul Veyne 2007)

« Quand sera venu le jour de séparer ce composé de divin et d’humain, je laisserai le corps ici, où je l’ai trouvé, et moi-même je me restituerai aux dieux. [...] Comme le sein maternel nous garde neuf mois et nous prépare [...], ainsi le temps qui s’étale de l’enfance à la vieillesse nous mûrit pour un autre enfantement naturel. Une autre naissance nous attend, un autre ordre de choses. [...]
   Regarde donc dès maintenant sans trembler cette heure décisive, qui n’est suprême que pour le corps, non pour l’âme. [...] Ce jour que tu redoutes comme le dernier est ta naissance à l’éternité. » (Sénèque, Lettre CII)

« “Dieu seul dure”, telle a toujours été la base fondamentale de la théologie sémitique, monothéiste. L’homme est un être passager, et le pire acte d’orgueil de sa part serait de s’égaler à Dieu, en s’attribuant l’éternité. Le Pharaon qui se bâtit des pyramides en vue d’une existence indéfinie, loin d’être considéré par le sage israélite comme un homme religieux, lui faisait l’effet d’un impie. La croyance à l’immortalité, loin de lui sembler pieuse, lui paraissait une injure à Dieu et au bon sens. [...] “Dans le scheol, on ne sent rien, on ne sait rien, on ne voit rien. […] Une fois que le souffle de la vie est remonté à Dieu qui l’avait donné, le corps se décompose et revient à la terre” [Cantique d’Ézéchias]. » (Ernest Renan 1881)

« Que les cellules du cerveau se trouvent pendant quelques minutes privées d’oxygène, et la conscience, immanquablement, s’évanouit. Que la privation d’oxygène persiste un petit quart d’heure, et par suite des changements irréversibles qu’entraîne l’asphyxie cellulaire, la conscience aura disparu de façon définitive. Plus jamais, dans le monde, ne se manifestera cette conscience-là, ce moi, unique comme tous les moi, et qui dépendait de l’intégrité de ces cellules particulières.
 Un éclair dans la nuit, ainsi a-t-on défini la pensée. Il ne s’agit, en effet, que d’une lueur, vacillante, et toujours menacée de s’éteindre. » (Jean Rostand 1954)

« La mort – alors tout s’effacera pour moi ? Plus de monde ? Plus rien ? Inimaginable.
   Et tous ceux que j’aime et qui m’aiment, ils s’éloigneront sans retour ?
   Inimaginable, et pourtant : l’expérience d’une anesthésie, par exemple. Je suis dans le “bloc” (opératoire), seul, sur le chariot. La “table” à côté de moi. Je revois la pièce. Et puis – plus rien. Aucun souvenir d’une piqûre ou de quoi que ce soit.
   J’aurais pu ne pas me réveiller. Ça s’est vu. Ça se voit pour des opérations plus risquées. La mort – ça ? Mais alors, il ne se serait rien passé ? J’arrive là inquiet mais confiant et – out, fini.
   Oh !
   La mort est impensable. […]
   La mort : je ne sais pas ce que c’est. Je ne sais pas ce que j’en pense, puisque je ne sais pas ce que c’est. » (Maurice Bellet 1988)

« L’étude du phénomène de l’avant-mort amène, tout naturellement, à l’étude des états qui lui ressemblent et dans lesquels l’être humain n’a que partiellement ou n’a plus du tout conscience de ce qui se passe en lui ou autour de lui. Tels sont l’anesthésie, la narcose, la syncope, la léthargie, la catalepsie, le sommeil.
   Le mécanisme de la perte du sentiment est, en effet, à peu près invariablement le même, quelle qu’en soit la cause. Et connaître la façon dont on s’anesthésie, s’évanouit ou s’endort, c’est connaître la façon dont on meurt. » (Georges Barbarin 1937)

« On peut dresser un schéma type de l’EMI [expérience de mort imminente ; angl. NDE : near death experience]. Tout commence par une subite “reprise de conscience” accompagnée de l’impression de percevoir depuis l’extérieur son corps et l’environnement. [...] Les individus qui ont vécu une EMI parlent aussi de tunnels obscurs au bout desquels ils ont aperçu une intense lumière, celle-ci se confondant avec la sensation d’un amour bien plus fort que tout ce qu’ils avaient pu ressentir au cours de leur vie. Une vie qui est d’ailleurs revisitée, soit dans son entier, soit dans ses moments clés, mais souvent en adoptant des points de vue nouveaux. Pour beaucoup, cette partie de l’expérience se fait en compagnie d’un guide bienveillant ou d’un être de lumière [...].
   Relevant les similitudes entre ces manifestations et certaines représentations religieuses du passage de vie à trépas, certains ont interprété les EMI comme la preuve de l’existence d’une vie après la mort. Bien évidemment, la science est incompétente sur cette question. » (Mathieu Grousson 2009)

« Il n’y a aucun doute que les témoignages d’EMI renvoient à une réalité sous-jacente. Laquelle ? On sait encore trop peu de chose sur le fonctionnement du cerveau lors des EMI pour répondre. Pour autant, jusqu’à preuve du contraire, il n’y a pas d’exemple d’état de conscience sans activité cérébrale. » (Steven Laureys 2009)

« Il est possible que les témoignages d’EMI indiquent que des états de conscience peuvent perdurer alors que le cerveau ne fonctionne plus. Qui sait si cela n’implique pas de repenser la question du corps et de l’esprit dans un cadre totalement différent...? » (Sam Parnia 2009)

« Voici un cerveau qui travaille. Voilà une conscience qui sent, qui pense et qui veut. Si le travail du cerveau correspondait à la totalité de la conscience, s’il y avait équivalence entre le cérébral et le mental, la conscience pourrait suivre les destinées du cerveau et la mort être la fin de tout. […] Mais si, comme nous avons essayé de le montrer, la vie mentale déborde la vie cérébrale, si le cerveau se borne à traduire en mouvement une petite partie de ce qui se passe dans la conscience, alors la survivance devient si vraisemblable que l’obligation de la preuve incombera à celui qui nie, bien plutôt qu’à celui qui affirme. » (Bergson 1912)

« Encore que [le corps] ne fût point, [l’âme] ne lairrait pas d’être tout ce qu’elle est. [...] [Notre âme] est d’une nature entièrement indépendante du corps, et par conséquent [...] n’est point sujette à mourir avec lui. » (Descartes)

« L’homme est dans le monde, sans être du monde, sans se confondre avec les objets qui le peuplent et qui ne pensent pas. De par son statut, l’homme est un être extra-mondain ; sa dimension métaphysique l’élève au-dessus des choses et il serait contradictoire qu’il perdît à jamais cette transcendance, qu’il fût englouti dans le monde matériel, du seul fait de la dissolution du corps. » (Léon Meynard 1958b)

« Mort inévitable. Expérience de quatre-vingts siècles : l'appareil fonctionne moins de cent cinquante ans. Et pourtant, chose étrange, je ne peux pas penser ma mort : je ne peux pas penser ma disparition absolue puisque le “je” qui pense cette disparition n'a pas disparu puisqu'il pense. Conséquence : ceux qui disent “il n'y a rien après la mort” ne savent pas ce qu'ils disent. Donc il y a quelque chose après la mort ? Conclusion hâtive : je n'en sais strictement rien... » (M. Quérin 1962)

« Puisque de ma mort, je ne peux rien prévoir, il serait rationnel d’admettre aussi qu’elle puisse ouvrir une autre possibilité, aujourd’hui à moi inconcevable. Car, si personne n’en sait rien, il ne se trouve pas plus de raison de la considérer comme une entrée au néant que comme l’ouverture d’une autre possibilité. Après tout, j’ai vécu neuf mois sans même savoir que j’étais, ni soupçonner ce qui m’attendait après ma naissance. Rabelais, mourant, aurait dit qu’il allait vers “le grand peut-être”. » (Jean-Luc Marion 2014)

« La joie veut l’éternité de toute chose, elle veut une profonde, profonde éternité ! » (Nietzsche)

« Père, entre tes mains je remets mon esprit. » (Évangile selon Luc)


Dieu ?

« Vous trouvez curieux que je considère la compréhensibilité du monde comme un miracle ou un éternel mystère. Eh bien, a priori on devrait s’attendre à un monde chaotique, qui ne peut en aucune façon être saisi par la pensée. [Le succès de la science] suppose un ordre de haut degré du monde objectif, qu’on n’était a priori nullement autorisé à attendre. C’est cela le “miracle” qui se fortifie de plus en plus avec le développement de nos connaissances.
   C’est ici que se trouve le point faible des positivistes et des athées professionnels [...]. Le curieux, c’est que nous devons nous contenter de reconnaître le “miracle”, sans qu’il y ait une voie légitime pour aller au-delà. » (Einstein 1952)

« Le ciel parle-t-il ? Ou faut-il se référer à Camus et sa phrase sur “le silence déraisonnable du ciel” ? L'univers est très vraisemblablement infini. Aucun centre. J'ignore, contrairement à Voltaire, s'il y a un grand horloger puisqu'il y a une horloge. Peut-être doit-on s'en tenir à la vision taoïste : un principe organisateur qui ne s'intéresse pas à l'homme. Car si Dieu s'y était intéressé, on n'aurait pas connu la Shoah et les Khmers rouges. » (Hubert Reeves 2012)

« Il y a trop de mal dans le monde, trop de souffrance et de malheur, et pas seulement pour l'humanité : les bêtes souffrent aussi, et depuis plus longtemps que nous, pour que la croyance en un Dieu bon et créateur soit moralement supportable. » (André Comte-Sponville 1989)

« Le mal physique, c'est la maladie, la souffrance, l'accident, la vieillesse avec son cortège de tares et d'infirmités, c'est la mort, la perte cruelle de ceux que nous aimons ; [...] il y a une foule d'êtres humains pour qui l'existence n'est qu'une longue suite de douleurs et d'afflictions, en sorte qu'il vaudrait mieux qu'ils ne fussent pas nés ; c'est, dans la domaine de la nature, les fléaux, les cataclysmes [...]. Qui oserait dire de ce mal physique que l’homme doit en être rendu responsable ? [...]
   De deux choses l'une : ou bien Dieu voudrait supprimer le mal, mais il ne le peut pas ; ou bien Dieu pourrait supprimer le mal, mais il ne le veut pas. Ici, Dieu est puissant, mais il n'est pas bon ; là, Dieu est bon, mais il n'est pas puissant. » (Sébastien Faure 1914)

« Si Dieu existe, d'où vient le mal ? S'il n'existe pas, d'où vient le bien ? » (Leibniz)

« Dieu est invraisemblable, c’est une affaire entendue. L’absence de Dieu est plus invraisemblable encore. » (Jean d’Ormesson, 2010)

« Que sais-je de Dieu et du but de la vie ? Je sais que le monde existe. [...] Qu’il y a quelque chose en lui de problématique, ce que nous appelons son sens. Que ce sens ne réside pas en lui, mais en dehors de lui. Que la vie est le monde. [...] Le sens de la vie, c’est-à-dire le sens du monde, nous pouvons l’appeler Dieu. Et y relier la comparaison de Dieu à un père. Prier, c’est penser au sens de la vie. » (Ludwig Wittgenstein 1916)

« Maintenant que nous remontons de l’inférieur jusqu’au Transcendant, notre discours se réduit à proportion de notre montée. Arrivés au terme nous serons totalement muets et entièrement unis à l’Indicible. » (Pseudo-Denys l'Aréopagite)

« Penser à Dieu et parler de lui comme s’il était “quelque chose”, un “il” au sens neutre, serait certainement faux ; [...] il serait en tout cas impertinent de le faire uniquement à la troisième personne du singulier, puisqu’il est dans l’essence même de Dieu de s’adresser à l’homme à la première personne et en lui disant “tu”. On ne peut jamais penser à Dieu et parler de lui en vérité qu’en lui répondant... » (Karl Barth 1962)

« Je ne veux pas me parler à moi-même et croire que c'est Dieu qui me parle. Il y a d'abord le silence de Dieu. » (Julien Green, Journal)

« Dieu est le silence de l’univers et l’homme le cri qui donne sens à ce silence. » (José Saramago 2010)

« Vraiment, tu es un Dieu caché. » (Isaïe)

« Dieu écrit droit avec des lignes courbes. » (Proverbe portugais)

« Nous avons l'être, nous ne sommes pas notre être. L'existence nous est seulement donnée ou, pour mieux dire, prêtée. Par quoi ? Par qui ? L'absence de réponse claire n'invalide pas la réalité de cette situation. » (D'après Etienne Klein 2010)

« Tout est possible, même Dieu. » (Renan 1889)


Échos de l'Antiquité

ÉGYPTE : De la main d'Atoum...

« Le Créateur solitaire, surgi de l'informel par la puissance de sa volonté, n'avait point de compagne ; il mit au monde dieux et hommes de par l'effort de son propre corps, par une jouissance personnelle, qui n’eut point de témoins.
  Ainsi s'exprime Atoum, dans le texte d'un rituel datant du IVe siècle avant J.-C., mais dont la pensée et l'expression relatent de très anciennes croyances : “Je m’étais uni à mon propre corps, de sorte qu’ils sortirent de moi après que j’eus produit l’excitation avec mon poing fermé, mon désir provenant de ma main et la semence tombant de ma bouche ; c'est ainsi que je crachai Shou et que j'expectorai Tefnout. Ainsi donc j’étais venu à l’existence, dieu solitaire et maintenant trois dieux m’appartenaient après que les deux divinités jumelles furent venues à l’existence sur cette terre.”
  Deux millénaires auparavant, on rencontre la même idée dans les textes sculptés dans les pyramides royales — ce qui prouve la pérennité de la croyance : “Atoum, une fois parvenu à l'existence, se livra à la masturbation en Heliopolis. Il plaça son phallus dans son poing et, ainsi, se créa du plaisir. Alors naquirent deux jumeaux, Shou en même temps que Tefnout.” » (Claire Lalouette 1998)

... au tour de potier de Khnoum...

« [Khnoum] façonna sur son tour les dieux et les hommes. […] Il organisa la marche du sang dans les os, modelant dans son atelier par l'action de ses bras. Alors le souffle de la vie imprégna toute chose. […] Il modela la peau sur les membres. Il fabriqua la tête et façonna le visage afin de donner leur personnalité aux figures. Il fit se déclore les yeux, il ouvrit les oreilles. […] Il détacha la langue pour qu'elle puisse s'exprimer. […] Il fit les mains avec leurs doigts pour faire leur ouvrage, le cœur pour conduire l'être, les testicules pour soutenir le phallus et accomplir l'acte sexuel […] et la matrice pour recevoir la semence et multiplier ainsi les générations en Egypte. […] Ainsi tous les êtres furent façonnés sur son tour. » (Claire Lalouette 1987)

... et au cœur de Ptah

« Ptah est le dieu créateur par excellence. C'est dans son cœur, dans son esprit, par la pensée, que le dieu-artisan Ptah conçoit le monde, lui donnant ensuite réalité par la parole. Ptah, c'est “celui qui a formé tous les dieux, hommes, animaux, qui a créé tous les pays” après s'être auto-engendré par la puissance de son esprit. Cœur et langage sont ainsi, dans cette cosmogonie, au tout début de toute chose. » (N. Guilhou et J. Peyré 2005)

GRÈCE : L'indifférence de Zeus

« Nous avons la sécheresse en ce moment. Pas un nuage à l'horizon, alors qu'il nous faut de la pluie et encore de la pluie. Même les labours ont soif : on le voit à l'aridité des mottes. C'est en vain, apparemment, que nous avons sacrifié à Zeus Huetios ; il ne nous a pas écoutés et pourtant je t'assure que les habitants du village ont rivalisé pour lui faire de beaux sacrifices. Chacun a participé en fonction de ses moyens et de ce qui lui restait. L'un a offert un bélier, l'autre un bouc, l'autre les produits de ses champs, les pauvres une galette de sacrifice, et les plus pauvres encore des grains d'encens moisis, mais personne n'a offert de taureau : nous n'avons pas abondance de bétail, nous qui vivons sur le sol maigre de l'Attique. Ces dépenses n'ont servi à rien. Apparemment, Zeus est occupé chez d'autres peuples ; il ne s'intéresse pas aux gens d'ici. » (Alciphron)

MÉSOPOTAMIE : Les leçons d'Utanapishtî

« C’est le lot de l’humanité que d’être brisée comme un roseau. […] La mort, personne ne l’a vue, nul n’a aperçu son visage, ni entendu sa voix. La mort cruelle qui brise les hommes… Bâtissons-nous des maisons pour toujours ? Scellons-nous des engagements pour toujours ? Partageons-nous un patrimoine pour toujours ? […] Nous sommes tous comme des éphémères emportés par le courant : de nos visages qui voyaient le soleil, brusquement il ne reste plus rien. Endormi, mort, c’est même chose ! Personne n’a jamais pu représenter la mort. Pourtant, depuis ses origines, l’homme en est prisonnier. Depuis que les grands dieux, et Mammitu, la grande déesse mère, la faiseuse de destins, ont arrêté ensemble les destinées des hommes, ils nous ont imposé la mort comme la vie, nous laisant seulement ignorer le moment de notre mort. » (L'Épopée de Gilgamesh)

... et les conseils de Siduri

« O Gilgamesh pourquoi erres-tu de tous côtés ?
la vie que tu poursuis tu ne l’atteindras pas ;
lorsque les dieux ont créé le genre humain,
ils lui ont fixé le destin de mourir,
et ils ont gardé l’immortalité entre leurs mains.
Pour toi, ô Gilgamesh, remplis ton ventre ;
jour et nuit, fais bombance ;
que chaque nuit soit une fête pour toi ;
jour et nuit satisfais-toi ;
porte des vêtements brodés,
lave ta tête et baigne-toi ;
prends plaisir à regarder ton petit qui se suspend à toi,
réjouis-toi que ton épouse se serre contre toi... » (ibid.)

IRAN : Le triomphe d'Ahura Mazda

« Aller au feu éternel, ce n'est pas, comme le dit le christianisme, aller au châtiment éternel, c'est aller à la rénovation. L'enfer et le paradis sont la récompense ou la punition des justes et des pécheurs, mais n'ont qu'une existence momentanée, ne durent que tant que l'humanité est aux prises avec l'Assaut, vit dans le temps linéaire qui s'achèvera un jour. Si le juste est sauvé dès son trépas et pour l'éternité, si celui dont les actes vertueux et les péchés s'équilibrent attend dans le hamestagan, une sorte de purgatoire, l'injuste, créature d'Ahura Mazda, ne saurait être damné pour toujours. La damnation n'est qu'un état provisoire. Quand il aura subi son châtiment, le méchant reviendra à Dieu. Le monde s'achèvera dans un embrasement qu'on appelle souvent l'“épreuve du métal fondu”, qui sera pour les uns “comme du lait chaud”, pour les autres trois jours horribles de souffrance – d'une souffrance qui est donc rédemptrice. Alors l'enfer sera détruit, Ahriman définitivement vaincu sera anéanti, les morts reviendront à la vie, seront réunis avec tous les hommes dans le paradis, avec Ahura Mazda, les Ameshu Spenta et les dieux. » (Jean-Paul Roux 2006)


Hindouisme

« How again can Hinduism be called a religion when it admits all beliefs, allowing even a kind of high-reaching atheism and agnosticism and permits all possible spiritual experiences, all kinds of religious adventures ? [...] To the Indian mind the least important part of religion is its dogma ; the religious spirit matters, not the theological credo. » (Sri Aurobindo 1919)

« [Religions of the west] generally reject as false all other religious beliefs and practices ; Hinduism, on the other hand, concedes some validity to them all. The western attitude is expressed by the words of Yahweh on Sinai, “You shall have no other gods before me” (Ex. xx, 3) ; in the Bhagavad Gita, the incarnate god Krishna says, “Whatever god a man worships, it is I who answer the prayer.” » (Encyclopædia Britannica 1966)

« Cosmology. – Indian religion contrasts sharply with the religions of the west in its conception of the size and duration of the universe. In place of the comparatively small, transient cosmos of traditional Judaism, Christianity and Islam, Hinduism postulates a universe immense in size and immensely long in duration, passing through a continuous process of development and decline. The fundamental cosmic cycle is the “day of Brahma,” a period of 4,320,000,000 years known as a kalpa. At the beginning of this day Vishnu lies asleep upon the cobra Shesha, symbolizing endless time, who in turn floats on the cosmic ocean, the primeval chaos. From Vishnu’s navel there grows a lotus, and from its bud is born the god Brahma who creates the universe on behalf of Vishnu, who then awakes and controls the cosmos throughout the day. At its end the world is destroyed, according to some accounts by Shiva, and is once more absorbed into Vishnu’s body. The god sleeps for a further kalpa, the “night of Brahma,” after which the process is repeated more or less indefinitely.
   According to some sources, Vishnu has a life of 100 “years of Brahma,” each of which consists of 360 days of Brahma. He is now 50 years old, and when he reaches his 100th year his personality will be lost in the one real and eternal impersonal entity, the Brahman. After a tremendously long period when nothing but the one Absolute World Spirit exists, a new Vishnu will appear and the process will begin once more. This scheme is to be found with modifications in various early texts, such as the Puranas, long collections of legendary and mythological stories which date from the 4th century A.D. » (Encyclopædia Britannica 1966)

« In the beginning this was Self alone, in the shape of a person (purusha). He looking round saw nothing but his Self. He first said, “This is I” ; therefore he became I by name. [...] But he felt no delight. [...] He wished for a second. He was so large as man and wife together. He then made this his Self to fall in two (pat), and thence arose husband (pati) and wife (patni). [...] He embraced her, and men were born. » (Brihadaranyaka Upanishad, une des plus anciennes Upanishads)

« [The Supreme Being] became conscious of Himself. And what was He conscious of ? Of Himself only, as “I Am-That-I-Am”, as the Great “I”... It was Pure, Universal Self-Awareness – Ātman... Because it asserted itself as the “Aham”, we call it “I-AM”. It has no other name... because God is Pure Self-Consciousness. This is the reason why, says the Upanishad, that even today people refer to themselves as “I”... This feature of assertion as the “I” or the “me” in all individuals is due to the original assertion of the Absolute as the “I”...
  That Being, the Original Universal Aloneness, began to contemplate Itself in a peculiar manner. This Self-contemplation of the Universal Oneness is the beginning of the Will to create. It felt that It was alone, and willed to be other than Itself. It was dissatisfied with Its aloneness, as it were... [The Upanishad] tells us that It did not wish to be alone. “Let me be many and see Myself as the variety of things”. In order to become the many, It became two, first... There was a simultaneous urge to become two, and also to become one. Here is the enigma of desire... The Origin of Cosmic manifestation necessitates the acceptance of an original split which caused a self-contradictory feeling of separation and unit simultaneously, as is there between a husband and wife... » (Swami Krishnananda)

« Un lotus en pleine floraison n'est pas de la boue parce qu'il trempe ses racines dans la boue, et la boue ne pourra jamais donner une fleur s'il n'y a pas au milieu de cette boue un germe contenant toutes les potentialités d'une fleur. » (S.B. Das Gupta 1961)


Judaïsme

« Choisir la vie : le bonheur d'être. » (Benjamin Gross 2014)

« Pour le judaïsme, la vie est bonne. [...] Il n’y a pas de place pour le masochisme ou pour le dolorisme. La Torah, qui est vie, a été donnée pour l’épanouissement et le joie de l’homme, pour accroître et fortifier sa vie, non pour le faire souffrir et mourir. » (Sr M. Despina 1974)

« Le judaïsme ne préconise ni n’encourage la multiplication des jeûnes et des pénitences ; il les déconseille même formellement : “L’homme ne doit pas se torturer par des jeûnes... car il est dit (Gen. 2,7) : l’homme devint un être vivant ; l’âme que je t’ai donnée, garde-la vivante !” (Talmud, Taanit 22b). La Tradition juive n’a jamais considéré cette vie comme une “vallée de larmes” utile seulement pour obtenir la vie éternelle – encore que les antisémites de tous les temps ne se soient pas privés de faire souffrir et massacrer les juifs. La nature humaine n’a pas à être réduite en tant que basse et pécheresse ; la vie terrestre n’a pas à être opprimée et cette vie n’est pas une simple épreuve : elle est un don de Dieu qui ne saurait être que bon et utile. » (idib.)

« Les joies légitimes de la vie sont un don de Dieu dont il serait indigne de faire fi : elles doivent servir d’occasion pour louer le Créateur. “L’homme devra rendre compte des plaisirs permis qu’il s’est refusés” (Talmud Jer. Kidd. IV,12). » (ibid.)

« Bien que surtout masculines, les références que la Bible contient pour parler de Dieu sont aussi maternelles. Il est vrai que la conception de la maternité dans la Bible est peu professée ; il existe toutefois assez d’indications que l’Israël ancien a loué des aspects maternels de Dieu. Ainsi, notre Père céleste aime comme une mère. Dieu montre de la tendresse, il porte dans ses bras, il connaît les douleurs de l’enfantement... Relevons le terme Rahamim, qui signifie “tendresse”, souvent celle de Dieu pour son peuple ; c’est le pluriel de sein maternel, utérus : ce terme confère à la bienveillance de Dieu un caractère de tendresse quasi charnelle. » (Valérie Pujol-Duval 2002)

« Ce qui me chagrine dans les jugements sévères de Jésus sur les scribes et les pharisiens est que je suis l’un de ceux qui pratiquent les observances des scribes et des pharisiens. […] Jésus a érigé un barrage de critiques si puissant contre des gens comme moi que depuis ce temps jusqu’à aujourd’hui ‘pharisien’ est devenu un terme générique au sens d’hypocrite. […]
  Nous qui essayons d’obéir à la Torah et d’accomplir les mitsvot [commandements], nous croyons que ce faisant nous observons l’alliance qui nous unit à Dieu : la Torah nous dit que c’est cela que Dieu attend de nous […]. Tel est le but de la vie sous la Torah : la sanctification de la vie de tous les jours à travers nos actions quotidiennes. » (Jacob Neusner 2008)

« Les points essentiels de la conception judaïque de la vie me paraissent être les suivants : affirmation du droit à la vie pour toutes les créatures ; la vie de l’individu n’a de sens qu’au service de l’embellissement et de l’ennoblissement de l’existence de tous les êtres vivants ; la vie est sacrée, c’est-à-dire qu’elle est la valeur suprême de laquelle doivent dépendre toutes les évaluations morales ; la sanctification de la vie super-individuelle entraîne la vénération de tout ce qui tient à l’esprit. […]
   Mais il se trouve autre chose dans la tradition judaïque ; c’est ce qui apparaît si magnifiquement dans maints psaumes, une sorte d’ivresse joyeuse et d’étonnement en présence de la beauté et de la sublimité de ce monde. » (Einstein 1934)


Christianisme

« Les Juifs demandent des miracles et les Grecs recherchent la sagesse ; mais nous, nous prêchons un messie crucifié, scandale pour les Juifs, folie pour les païens... » (Saint Paul, Première épître aux Corinthiens)

« Si le Christ n’est pas ressuscité, votre foi est vaine [...]. Alors aussi ceux qui sont morts dans le Christ ont péri. Si c’est pour cette vie seulement que nous avons mis notre espoir dans le Christ, nous sommes les plus malheureux de tous les hommes. Mais non, le Christ est ressuscité des morts... » (ibid.)

« Il n'y a plus ni Juif ni Grec, il n'y a plus ni esclave ni homme libre, il n'y a plus ni homme ni femme ; car tous vous n’êtes qu’un en Jésus-Christ. » (Saint Paul, Épître aux Galates)

« Quand vous priez, ne soyez pas comme les hypocrites qui aiment faire leurs prières debout dans les carrefours, afin d'être vus des hommes. En vérité, je vous le déclare : ils ont reçu leur récompense. Pour toi, quand tu veux prier, entre dans ta chambre la plus retirée, verrouille ta porte et adresse ta prière à ton Père qui est là dans le secret. Et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra. » (Évangile selon Matthieu)

« Aime et fais ce que tu veux. » (Saint Augustin)

« Aucun homme ne s’est donné à lui-même son existence. » (Benoît XVI 2006)

« Dans le dessein de Dieu, chaque personne est unique et irremplaçable. » (Benoît XVI 2012)

« Dieu est Père, mais plus encore il est Mère. » (Jean-Paul Ier, 1978)

« John Cooper rapporte qu’Augustin, Chrysostome, Bonaventure et même Calvin ont utilisé un langage féminin pour Dieu. [...]
  Certaines traditions chrétiennes ont voulu résoudre le problème de la masculinité de la divinité en accordant une place surélevée à Marie, mère du Christ, qu’on pourrait adorer aussi. Ainsi A. Durwood Foster se demande si la personne de Marie ne pourrait pas avoir un rôle plus grand dans le christianisme comme co-déesse ? On retrouve cette idée d’une déesse dans le mouvement de la Goddess Religion. Mais comme le rappellent Jürgen Moltmann et Karl Rahner, Marie ne doit pas être divinisée pour récupérer la dimension féminine du divin. Elle n’est qu’une femme. [...]
   Dieu, par définition, transcende l’expérience humaine et son langage. Il est le Tout Autre. Il est Esprit (Jn 4:24). Si l’homme et la femme ressemblent à Dieu (Gn 1), Dieu ne ressemble ni à l’homme ni à la femme... [Il] n’est ni masculin ni féminin. Dieu a introduit la “sexualisation” dans la création, il a créé la sexualité. Il n’est pas lui-même sexué. De même qu’il a créé le temps, mais n’est pas temporel. [...]
   Le Fils vient du Père, c’est-à-dire que le Père, à la fois, engendre un fils et le met au monde : il n’est donc pas qu’un père masculin, il est plutôt un père maternel. [...]
   En utilisant Abba, Jésus met l’accent, non sur les traits masculins et patriarcaux, mais sur la proximité. Jésus ne veut pas évoquer un sexe particulier ni une autorité, mais indiquer le type de relations que nous avons avec le Père : intime, qui prend soin de nous, où l’on est aimés, protégés, chéris, nourris. » (Valérie Pujol-Duval 2002)

« Je ne comprends pas, je ne comprends pas, je ne comprends pas les paroles dures qui sont dans l'Évangile. » (Maurice Bellet 1988)

« ‘Je suis venu opposer l’homme à son père, la fille à sa mère et la bru à sa belle-mère : on aura pour ennemis les gens de sa famille. Qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi.’ (Mt 10, 34-37.) [...]
   L’enseignement de Jésus à propos du commandement concernant la famille : “Honore ton père et ta mère…” (Ex 20, 12) me fait sursauter et m’alarme. [...] Suivre Jésus m’oblige à placer son appel plus haut que tout, même l’amour des parents : “… qui ne prend pas sa croix et ne suit pas derrière moi n’est pas digne de moi. Qui aura trouvé sa vie la perdra et qui aura perdu sa vie à cause de moi la trouvera” (Mt 10, 38-39). Donc, si je fais ce qu’il dit, j’abandonne mon père et ma mère, mes frères et mes sœurs, ma femme et mes enfants. [...] Or la Torah m’impose des devoirs sacrés envers le foyer et la famille et aussi envers la communauté.  » (Jacob Neusner 2008)

« “Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes et donne-le aux pauvres et tu auras un trésor dans les cieux ; puis viens, suis-moi. Entendant cette parole, le jeune homme s’en alla contristé, car il avait de grands biens. (Mt 19, 16-22.) [...]
   La perfection, rien que cela ! Si au moins j’observais ce que Dieu, connaissant ma fragilité, me demande : au moins les Dix Commandements (ou quelques-uns d’entre eux), au moins “aime ton prochain comme toi-même”. Perfection ? Qui en a jamais parlé, qui y a jamais pensé ? [...] Étant donné la fragilité de l’humanité, personne ne peut exiger que la perfection soit le prix à payer pour la vie éternelle. [...] Tout ce que [les maîtres de la Torah] exigeaient était la foi et la loyauté envers Dieu, un Dieu de miséricorde et de pardon ferait le reste. [...]
   Et pourtant, j’ai le sentiment qu’une réduction radicale s’est opérée quand nous sommes passés de la perfection au “suis-moi”. [...] Quelle est en vérité la plus haute valeur dans la vie ? Jésus répond : “Suis-moi” ; la Torah répond : “Soyez saints, car je suis saint.” » (ibid.)

« Les hommes confrontés au silence et à l'absence de Dieu – et plus que jamais lors des grands drames du XXe siècle – ont de leur côté pris bien souvent l'initiative d'interpeller Dieu, comme le firent avant eux Job, comme les prophètes et les psalmistes aux heures de détresse et comme le fit lui-même le Christ sur la croix : “Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ?” (Ps 22, Mt 27, 46, Mc 15, 34).
   À force d'appeler dans le vide, certains désespèrent et voient dans le silence de Dieu la preuve de son inexistence. D'autres, malgré leur propre désarroi, vivent de bout en bout l'épreuve en persévérant dans leur foi. “Mais c'est l'agonie toute pure, sans un mélange de consolation”, confiera Thérèse de Lisieux. “C'est en moi de terribles ténèbres. Comme si tout était mort, en moi, car tout est glacial”, écrira Mère Teresa. [...]
   Pourtant, Dieu continue de parler. Mais, comme le montre le récit biblique d'Élie à l'Horeb (1 R 19, 8-18), la discrétion est la marque de sa Parole. Dieu ne se manifeste pas dans le grandiose, mais dans le cœur de l'homme à l'écoute. En entrant dans le silence, en lisant les Écritures, il arrive ainsi que le croyant fasse l'expérience qu'une parole lui est personnellement adressée. » (Martine de Sauto 2011)

« Ce qui m’étonne, dit Dieu, c’est l’espérance.
Et je n’en reviens pas.
Cette petite espérance qui n’a l’air de rien du tout.
Cette petite fille espérance.
Immortelle. » (Charles Péguy 1929)

Regards chrétiens sur l'Évolution

« Les théories de l’évolution qui, en fonction des philosophies qui les inspirent, considèrent l’esprit comme émergeant des forces de la matière vivante ou comme un simple épiphénomène de cette matière sont incompatibles avec la vérité de l’homme. » (Jean-Paul II, 1996)

« Avec l’homme, nous nous trouvons donc devant une différence d’ordre ontologique, devant un saut ontologique, pourrait-on dire. Mais poser une telle discontinuité ontologique, n’est-ce pas aller à l’encontre de cette continuité physique qui semble être comme le fil conducteur des recherches sur l’évolution, et ceci dès le plan de la physique et de la chimie ? La considération de la méthode utilisée dans les divers ordres du savoir permet de mettre en accord deux points de vue qui sembleraient inconciliables. Les sciences de l’observation décrivent et mesurent avec toujours plus de précision les multiples manifestations de la vie et les inscrivent sur la ligne du temps. Le moment du passage au spirituel n’est pas objet d’une observation de ce type, qui peut néanmoins déceler, au niveau expérimental, une série de signes très précieux de la spécificité de l’être humain. Mais l’expérience du savoir métaphysique, de la conscience de soi et de sa réflexivité, celle de la conscience morale, celle de la liberté, ou encore l’expérience esthétique et religieuse, sont du ressort de l’analyse et de la réflexion philosophiques, alors que la théologie dégage le sens ultime selon les desseins du Créateur. » (ibid.)

« [Dans la perspective darwinienne, l'homme] n’apparaît pas seulement comme sortant d’une longue évolution des espèces animales (cela est une question après tout secondaire, purement historique), mais bien comme sortant de cette évolution biologique sans discontinuité métaphysique, sans qu’à un moment donné, avec l’être humain, quelque chose d’absolument nouveau commence dans la série : une subsistance spirituelle impliquant à chaque génération d’un être humain qu’une âme individuelle est créée par l’auteur de toutes choses et jetée dans l’existence pour une destinée éternelle. » (Jacques Maritain 1936)


Pascal

« Le silence éternel de ces espaces infinis m’effraie. » [206]

« Que l’homme, étant revenu à soi, considère ce qu’il est au prix de ce qui est ; qu’il se regarde comme égaré dans ce canton détourné de la nature [...]. Qu’est-ce qu’un homme dans l’infini ? » [72]

« Quand je considère la petite durée de ma vie, absorbée dans l’éternité précédant et suivant, le petit espace que je remplis et même que je vois, abîmé dans l’infinie immensité des espaces que j’ignore et qui m’ignorent, je m’effraie et m’étonne de me voir ici plutôt que là, car il n’y a point de raison pourquoi ici plutôt que là, pourquoi à présent plutôt que lors. Qui m’y a mis ? Par l’ordre et la conduite de qui ce lieu et ce temps a-t-il été destiné à moi ? » [205]

« Car enfin, qu'est-ce que l'homme dans la nature ? Un néant à l'égard de l'infini, un tout à l'égard du néant, un milieu entre rien et tout. Infiniment éloigné de comprendre les extrêmes, la fin des choses et leur principe sont pour lui invinciblement cachés dans un secret impénétrable, également incapable de voir le néant d'où il est tiré et l'infini où il est englouti. » [72]

« L’homme n’est qu’un roseau, le plus faible de la nature ; mais c’est un roseau pensant. Il ne faut pas que l’univers entier s’arme pour l’écraser : une vapeur, une goutte d’eau, suffit pour le tuer. Mais, quand l'univers l'écraserait, l'homme serait encore plus noble que ce qui le tue, parce qu'il sait qu'il meurt, et l'avantage que l'univers a sur lui, l'univers n'en sait rien. » [347]

« Tous les corps, le firmament, les étoiles, la terre et ses royaumes, ne valent pas le moindre des esprits ; car il connaît tout cela, et soi ; et les corps, rien. [...] De tous les corps ensemble, on ne saurait en faire réussir une petite pensée : cela est impossible, et d’un autre ordre. » [793]

« Par l'espace, l'univers me comprend et m'engloutit comme un point ; par la pensée, je le comprends. » [348]

« L’homme est à lui-même le plus prodigieux objet de la nature ; car il ne peut concevoir ce que c’est que corps, et encore moins ce que c’est qu’esprit, et moins qu’aucune chose comme un corps peut être uni avec un esprit. C’est là le comble de ses difficultés, et cependant c’est son propre être. » [72]

« Quelle chimère est-ce donc que l'homme ? Quelle nouveauté, quel monstre, quel chaos, quel sujet de contradiction, quel prodige ! Juge de toutes choses, imbécile ver de terre ; dépositaire du vrai, cloaque d'incertitude et d'erreur ; gloire et rebut de l'univers. » [434]

« L’homme n’est ni ange ni bête, et le malheur veut que qui veut faire l’ange fait la bête. » [358]

« Quelle raison ont-ils de dire qu’on ne peut ressusciter ? quel est plus difficile, de naître ou de ressusciter, que ce qui n’a jamais été soit, ou que ce qui a été soit encore ? » [222]

« Incompréhensible que Dieu soit, et incompréhensible qu’il ne soit pas ; que l’âme soit avec le corps, que nous n’ayons pas d’âme ; que le monde soit créé, qu’il ne le soit pas... » [230]

« Cet étrange secret, dans lequel Dieu s’est retiré... » (1656)

« La dernière démarche de la raison est de reconnaître qu’il y a une infinité de choses qui la surpassent. » [267]


Énigmes

« Plus nous ouvrons les yeux, plus la nuit est profonde... » (Lamartine 1830)

« [L'immensité] est un océan qui vient battre notre rive, et pour lequel nous n'avons ni barque ni voile. » (Littré 1863)

« Millions of books written on every conceivable subject by all these great minds, and, in the end, none of them knows anything more about the big questions of life than I do. » (Woody Allen 1986)

« Le monde où nous vivons n’est pas seulement inépuisable. Avec la lumière, avec le temps, mystère des mystères, avec cette chose inouïe qu’est la vie, avec cette chose plus inouïe encore qu’est la pensée, il est aussi, et surtout, invraisemblable.
   Il nous paraît aller de soi pour la seule raison que nous y sommes habitués. » (Jean d’Ormesson 2010)

« Pourquoi l’être ? Parce que l’être. Que cette réponse n’en soit pas une, c'est bien clair. C’est pourquoi la question continue de se poser. C’est ce qu’on appelle un mystère (par différence avec un problème, qui a une solution au moins possible), et l’être en est un, le seul peut-être. Comment pourrait-on l’expliquer, puisque toute explication le suppose ? L’homme interroge. Le silence lui répond. » (André Comte-Sponville 2010)

« Qu’est-ce donc que le temps ? Si personne ne m’interroge, je le sais ; si je veux répondre à cette question, je ne sais plus. » (Saint Augustin, Confessions)

« Ut cuspis sic vita fluit, dum stare videtur. » (Cadrans solaires)

« ... l’existence humaine sortant de l’énigme du berceau et aboutissant à l’énigme du cercueil. » (Victor Hugo)

« L'homme se meut entre les limites temporelles de la naissance et de la mort. Mais parce qu'il pense, il dépasse infiniment ces limites. » (Jean Boisset 1945)

« ... je suis né et je vais mourir, nous sommes des animaux, des mammifères, qui doivent pour exister respirer, manger et boire, dormir, se réchauffer ou s'abriter (et uriner et déféquer — mais oui ! Et tous les jours). Et nous sommes “le roseau pensant”, l'éveil, la pensée, la parole, l'ouverture inouïe au sein de l'univers. Et tout ensemble. » (Maurice Bellet 1996)

« La pensée n’est qu’un éclair au milieu d’une longue nuit, mais c’est cet éclair qui est tout. » (Henri Poincaré 1905)

« Borné dans sa nature, infini dans ses vœux, L'homme est un dieu tombé qui se souvient des cieux. » (Lamartine 1820b)


Varia

« Selon l'excellente définition d'Auguste Comte, le matérialisme est la doctrine qui explique le supérieur par l'inférieur. Qu'est-ce qui en fait le faux ? C'est que précisément il est contradictoire, comme dit Aristote, que le meilleur provienne du pire, que le moins produise le plus. Et lorsque le matérialisme réussit en apparence à rendre compte, dans tel ou tel cas, du supérieur par l’inférieur, c’est que, par une subreption dont il ne s’est pas aperçu, il a mis déjà dans l’inférieur ce supérieur que, ensuite, il croit et semble en faire naître. » (Félix Ravaisson 1867)

« La matière ou les éléments mis en œuvre par la nature paraissent inhabiles à réaliser cette perfection, but final des tendances universelles. Ainsi, il est évident de par l’expérience que, dans le système des mondes, la sphère est conçue, si l’on peut ainsi dire, comme une figure dont tous les points extérieurs sont également éloignés du centre ; le cercle de même, etc. – Et, cependant, il n’y a point de sphère parfaite ; la nature est inhabile à la réaliser.
   De là une distinction entre réel et idéal. » (Proudhon 1896)

« La peur de la mort est d’autant plus grande qu’on n’a pas osé vivre. [...] Oser vivre, c’est oser mourir à chaque instant, mais c’est également oser naître... » (Arnaud Desjardins 1989)

« Si l'homme était une chose entre les choses, il ne saurait en connaître aucune, puisqu'il serait, comme cette chaise ou cette table, enfermé dans ses limites, présent en un certain lieu de l'espace et donc incapable de se les représenter tous. » (Maurice Merleau-Ponty 1966)

« La personne n’est pas un objet. Elle est même ce qui dans chaque homme ne peut être traité comme un objet. Voici mon voisin. [...] Il est fonctionnaire, et il y a un statut du fonctionnaire, une psychologie du fonctionnaire que je puis étudier sur son cas, bien qu’ils ne soient pas lui, lui tout entier et dans sa réalité compréhensive. Il est encore, de la même façon, un Français, un bourgeois, ou un maniaque, un socialiste, un catholique, etc. Mais il n’est pas un Bernard Chartier, il est Bernard Chartier. Les mille manières dont je puis le déterminer comme un exemplaire d’une classe m’aident à le comprendre et surtout à l’utiliser, à savoir comment me comporter pratiquement avec lui. Mais ce ne sont que des coupes prises chaque fois sur un aspect de son existence. Mille photographies échafaudées ne font pas un homme qui marche, qui pense et qui veut. » (Emmanuel Mounier 1949)

« Si on me presse de dire pourquoi je l'aimais, je sens que cela ne se peut exprimer, qu'en répondant : “Parce que c'était lui, parce que c'était moi”. » (Montaigne)

« Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé ! » (Lamartine 1820a)


Sources

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ALLEN, Woody. Hannah and Her Sisters, 1986.

ARISTOTE. Physique II, 8. Cité par O. Hamelin, Essai sur les éléments principaux de la représentation, Alcan, 1925, p. 293-294.

ARNOULD, Jacques (2009). Débat avec Pascal Picq, Le Figaro, 14 avril 2009.

AUGUSTIN, saint. Commentaire sur l’épître de saint Jean, VII, 8. [« Dilige et quod vis fac » ; version déformée : « Ama et fac quod vis »]

—— . Confessions, chap. XI.

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BATAILLE, Georges (1943). L'expérience intérieure, p. 109.

BELLET, Maurice (1988). L'Épreuve ou le tout petit livre de la divine douceur, Desclée de Brouwer, p. 85, 47-48, 67.

—— (1996). L’Europe : au-delà d’elle-même, Desclée de Brouwer, 1996, p. 56.

BENOÎT XVI (2006). Homélie du 9 juillet 2006.

—— (2012). Discours du 15 septembre 2012.

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BERNARD, Claude. Lettre à Madame Raffalovich.

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Cadrans solaires : Lycée Louis-le-Grand, Hôpital hospice de Laon (Aisne), Presbytère de Bruyères (Vosges)... [Variantes : Ut cuspis sic vita fugit dum stare videtur. Sic vita, dum fugit, stare videtur. Sic vita fugit dum stare videtur. Etc.]

CHAMBON, Philippe (1991). Rencontre avec S. J. Gould, Sciences et Avenir,  n° 532, juin 1991, p. 49.

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